dimanche 25 décembre 2016

Des revues et des livres à propos de Julien Gracq








La découverte de la revue 303 consacrée à Gracq m'a fait en rechercher d'autres, que je me suis fait offrir  pour noël. J'avais déjà deux Magazine littéraire avec un dossier sur lui, ainsi que le numéro des Cahiers de l'Herne.




S'ajoute à cela deux livres sur Gracq que je suis impatient de lire.








lundi 19 décembre 2016

Les lectures de François Mitterrand

L'INA propose deux émissions littéraires des années 70, consacrées aux lectures de François Mitterrand. Nous les avons regardées toutes les deux et, malgré une image de piètre qualité, ce fut à chaque fois un bon moment. 
Bernard Pivot a reçu François Mitterrand, qui inaugura une nouvelle formule de l'émission, la présentation de ses propres lectures, en février 1975.
L'émission littéraire mensuelle de Michel Polac (Bibliothèque de poche) a rendu visite à François Mitterrand dans sa bibliothèque en juin 1970, pour parler de ses lectures marquantes.
Entendre Mitterrand parlé de ses lectures est un plaisir et il me semble que c'est dans ces moments là que le réservé et discret homme politique se dévoile : ses yeux s'illuminent, ainsi que son visage.

Ces émissions suscite aussi de la nostalgie, évidemment : nostalgie pour une télévision de qualité, qui prenait le temps et ne prenait pas son public pour des imbéciles mais aussi nostalgie pour une classe politique cultivée, qui savait parler correctement.

François Mitterrand n'évoque pas Julien Gracq lors de ces émissions, mais il aimait lire Gracq et passait souvent à la librairie Corti. Je sais que, devenu président de la république, il a voulu l'inviter trois fois à l'Elysée mais que l'écrivain, qui ne l'appréciait pas, a décliné à chaque fois l'invitation. J'en éprouve du regret tant ces deux hommes auraient eu, selon moi, des choses à se dire, à propos de la littérature.

vendredi 16 décembre 2016

Un magnifique cadeau



Merci Barbara pour cette sublime revue consacrée à Julien Gracq ! Il m'a été très difficile d'en arrêter la lecture après la pause méridienne pour assurer les trois dernières heures cours de l'année 2016...
J'ai découvert que cette revue avait déjà fait tout un numéro sur Gracq en 1986, que je vais me procurer de ce pas, même s'il semble moins riche que celui - ci. Et pour aller avec, sans doute ce numéro de la revue Givre, également.





jeudi 15 décembre 2016

Quatre extraits de Julien Gracq

Ils proviennent d'une émission de France Culture, intitulée Morceaux choisis.
Une évocation de Nantes dans Lettrines.
    Un poème en prose de Liberté Grande.
    Un chapitre du roman Un balcon en forêt.
    La découverte du volcan surplombant Rhages dans Le rivage des Syrtes.
    Et enfin, le prologue de Un beau ténébreux.  

dimanche 11 décembre 2016

Sauvé par les livres

Voici un extrait d'un entretien accordé par Edouard Louis (de son vrai nom Eddy Bellegueule), auteur d'Histoire de la violence et de En finir avec Eddy Bellegueule. Il y parle de la lecture et des livres, qui ont changé sa vie. Vous aimiez lire, petit ?
"Pas du tout. Il n’y avait aucun livre à la maison. Pour nous, les livres, c’était un peu le symbole de la vie qu’on n’aurait jamais, de tout ce qui nous excluait. Alors on les excluait en retour, comme une vengeance. On se vengeait de la culture. Même au lycée, au début, je ne lisais pas : j’ai fait un bac littéraire, mais je n’ai lu aucun des livres au programme, seulement des fiches, parce que je gardais cette haine de la culture légitime. C’était pourtant des livres super, que maintenant j’adore…"
Quand se produit votre rencontre avec la littérature ?
"En terminale, avec Juste la fin du monde, de Jean-Luc Lagarce. A l’époque, je fais huit heures de théâtre par semaine : même si je lis peu, je suis bien obligé d’apprendre mes scènes ! Et cette année-là, c’est Lagarce qui est au programme.
Au début, je trouve cette langue trop difficile, presque insupportable. Mais soudain je comprends le texte, et je vois ma vie de manière complètement différente. L’histoire de ce fils d’un milieu populaire, qui en part et y revient, cette distance, cet arrachement avec sa famille… Tout ça avait déjà commencé pour moi depuis que j’étais au lycée. Je lis ce livre, et j’entre alors dans une détresse des origines, car je comprends ma place au monde."
Quand vous publiez votre premier roman, vous êtes étudiant à l’ENS, et quatre ans ont passé depuis votre bac. Que vous arrive-t-il entre-temps ?
"Je lis Retour à Reims, de Didier Eribon, et c’est après Lagarce le deuxième grand marqueur de ce que je me sens devenir. Avant le bac, plusieurs enseignants m’avaient conseillé de faire une prépa. Mais le rêve, pour moi, c’était l’université, ce qu’on voyait à la télévision avec ma famille. Je me suis donc inscrit à l’université d’Amiens, en histoire et en sociologie… jusqu’à ce que la mère d’un ami me conseille Retour à Reims.
L’histoire de ce garçon qui quitte Reims pour vivre à Paris, qui commence à écrire pour les grands journaux, qui se lie d’amitié avec des gens comme Bourdieu, Duras, Foucault… Je lis, je me dis : « C’est ma vie ! »… et je me rends compte que c’est faux. Car à cette époque-là, je ne lis quasiment pas. Et je n’ai encore jamais pensé à écrire."
Et alors ?
"Alors c’est une immense secousse. Je rencontre Didier Eribon, qui présente son livre à Amiens dans le cadre d’un séminaire universitaire. Je lui demande ce que je dois lire, il me conseille Spectres de Marx de Derrida et La Distinction de Bourdieu, et puis Duras bien sûr.
Je suis ses conseils. Au début, je ne comprends rien. Je me souviens d’heures passées à pleurer tout seul devant mes livres… Mais je m’acharne, et à force la lecture devient de moins en moins difficile. Et l’idée d’aller à Paris grandit… jusqu’à ce que je le fasse.
Je me rends compte que beaucoup des gens que je lis sont passés par l’ENS, je découvre que depuis quelques années il est possible d’y entrer depuis l’université, je travaille pendant deux ans, comme un fou… Et ça marche."

Julien Gracq professeur



En 1928, Louis Poirier, plus connu sous son pseudonyme de Julien Gracq, a été reçu au baccalauréat avec mention Très bien. Admis en classe préparatoire au Lycée Henri IV à Paris, il suivit les cours de philosophie d'Alain. En 1930, Louis Poirier fut admis à l'École normale supérieure et suivait en parallèle des cours à l'École libre des sciences politiques (il en sortit diplômé en 1933). 
Choisissant d'étudier la géographie, en hommage à Jules Verne, dira-t-il par la suite, il fut l'un des élèves d'Emmanuel de Martonne et d'Albert Demangeon, deux grands géographes. En 1934, Louis Poirier publia son premier texte, un article en partie issu d'un mémoire universitaire, "Bocage et plaine dans le sud de l'Anjou", qui parut dans les Annales de géographie. La même année, il fut reçu à l'agrégation d'histoire et géographie, et affecté, d'abord à Nantes, au lycée Clemenceau où il avait été élève, puis à Quimper. 
Mobilisé lors de la drôle de guerre et la défaite, il fut fait prisonnier dans un stalag par les Allemands et libéré en 1941 suite à une infection pulmonaire. Julien Gracq reprit alors ses activités d'enseignement, au lycée d'Angers d'abord, puis, à partir de 1942, à l'université de Caen en qualité d'assistant de géographie, où il entama une thèse sur la morphologie de la Basse-Bretagne, qu'il n'acheva cependant pas. 
En 1946, Louis Poirier quitta l'université de Caen. Il fut nommé l'année suivante au lycée Claude-Bernard de Paris, où il enseigna l'histoire-géographie jusqu'à sa retraite en 1970. 

Voici des extrait d'un entretien donné par Julien Gracq en 1995, à propos de l'un de ces ancien élève, devenu écrivain. 
 "Vous avez écrit de Jean-René Huguenin : «Il avait été mon élève. Mais d'un élève on ne sait rien.» Gardez-vous quand même un souvenir précis de l'adolescent Huguenin, et du groupe qu'il pouvait former autour de lui ? 
 Julien Gracq : "J'ai eu Huguenin comme élève en troisième, puis dans une classe de terminale. Il est certain - surtout en histoire - qu'on n'a pas des rapports directs, très fournis, avec les élèves; on ne les a que trois heures par semaine, cela reste un peu anonyme. Mais j'ai un souvenir assez net de Huguenin, et surtout d'une espèce de remous qui se promenait autour de lui dans la classe. 
Une classe, ce n'est pas seulement quarante élèves et autant d'individualités : c'est aussi des agrégats. On perçoit cela très vaguement du bureau où on parle, mais on voit bien, à l'entrée, à la sortie, qu'il y a des attractions qui se produisent, des petits groupes qui se forment, par affinités ou hostilités... 
Et visiblement, Huguenin était le centre d'un de ces groupes. Il y avait là surtout Renaud Matignon, qui a dû le suivre dans toute sa scolarité - en ce qui concerne Jean-Edern Hallier, je ne suis pas sûr de l'avoir eu comme élève, quoi qu'il le dise... - et puis quelques autres. 
Huguenin n'était pas un élève particulièrement brillant; c'était un bon élève, travailleur, dont je crois qu'il ne portait pas un intérêt spécial par ailleurs à l'histoire et à la géographie... Mais il avait une physionomie, je me rappelle très bien qu'il tranchait sur les autres - d'abord, par une espèce d'aisance physique, et puis par un certain détachement coupant. C'était une personnalité, qui devait en imposer à ce groupe. Voilà l'idée qu'il m'a laissée de lui au lycée. 
(...) 
Je repense à ce sujet au lycée Claude-Bernard, où je l'ai eu comme élève: la première année où j'y ai enseigné, j'avais une sixième, que je n'ai pas gardée ensuite; j'ai eu des troisièmes, des terminales... Chaque classe avait son étage, son couloir. Et à l'interclasse, quand les élèves de sixième sortaient, c'était une véritable danse de Saint-Gui, ils remuaient bras et jambes de tous les côtés! 
Chez ceux de cinquième et de quatrième, cela diminuait - pour en arriver à ceux de terminale, qui, à côté, étaient presque des petits vieux: il n'y avait pas de bruit, ils parlaient tout doucement, ils hochaient la tête avec sagacité... C'est incroyable combien cela va vite, combien, entre onze et dix-sept ans, la vitalité cesse de s'extérioriser! C'est comme un feu qui pétille, et puis après... ce sont des braises.

Voici maintenant ce que l'élève, devenu écrivain, disait de son professeur : "Cette voix ouatée, secrète, qui chuchote la fin de ses phrases est celle de mon ancien professeur d’histoire au lycée Claude-Bernard, Julien Gracq. A cette époque, ses élèves ne connaissaient pas ce nom. Nous ne savions rien de lui. Sa réserve nous intimidait. Il avait le sourire trop rare, le regard trop froid. Nous pressentions un mystère. Ce mystère qui avait inquiété une classe de première, passionna d’un seul coup le monde littéraire et son public.
Jean René Huguenin, Une autre jeunesse, Edition du Seuil, 1965. 

Alain Jaubert, un autre élève de monsieur Poirier au lycée Claude-Bernard, a raconté ses souvenirs de classe dans le Magazine Littéraire de décembre 1981 (merci Barbara !) : 
"Mais monsieur Poirier n'était que le prof d'histoire-géo et jamais il une nous parla de littérature. de petite taille, un visage sévère aux tempes rasées, les cheveux coupés "au bol",, souvent vêtu de costumes sombres, toujours cravaté, l'énigmatique personnage impressionnait suffisamment pour n'avoir jamais besoin d'élever la voix. Je crois bien que toute sa carrière il ne connut aucun chahut. On ne le voyait jamais traîner dans les couloirs ni dans la cour de récréation comme ces professeurs un pu trop familier qui recherchaient la camaraderie de leurs élèves. Il surgissait de nulle part, à l'heure précise, accrochait son manteau, montait sur l'estrade s'asseyait devant son pupitre où il étalait, toujours de la même façon, ses carnets, un stylo, sa montre aussi je crois. Il ne souriait jamais. Au début du cours, il demandait le cahier de classe,, faisait rapidement l'appel, convoquait successivement au tableau trois ou quatre élèves qu'il interrogeait, puis, d'une voix monocorde, reprenait son cours exactement là où il l'avait arrêté à la fin de l'heure précédente. 
les évènements historiques que nous vivions alors - Budapest la guerre d'Algérie le 13 mai 1958 - et qui nous agitait tant,ne provoquait chez lui pas lem oindre commentaire. Et, de toute façon, même s'il improvisait pour nous à partir de ses notes un cours bien à lui, distinct du livre officiel il ne débordait jamais du programme. Il ne dépassait pas non plus l'heure qui lui était impartie. Précis, méticuleux, il s'arrangeait pour que son discours s'achève à la seconde même où se déclenchait les sonneries. Il refermait alors ses carnets, remettait son stylo dans sa poche enfilait son manteau et repartait exactement comme il était venu, sévère, songeur discret. 
A cette discrétion extrême il fit une fois une entorse. Au moment où il traitait de la puissance économique des Etats - Unis, il évoqua soudain un récent voyage à travers le continent nord-américain. Et pour nous décrire à la fois le gaspillage à l'américaine le sens du travail et le mythe du "self made man", (...). Ce souvenir de voyage, c'était comme une obscène confidence sur sa vie privée. 
(...) 
Un soir tard,, comme j'arrivai à la Cinémathèque, rue d'Ulm,où, à la dernière séance on projetait l'Age d'or je tombai sur Gracq. Il me vit, parut surpris et même gêné de rencontrer un de ses élèves à une heure si tardive et dans ce lieu insolite.Il ne dit rien. Et moi, je fis semblant de ne pas le voir.
Le lendemain, au début du cours d'histoire,, il m'appelait, ce qu'il n'avait encore jamais fait, et m'interrogea sur la politique de Guillaume II. Je n'avais pas même jeté un coup d'oeil sur mes notes de cours ni sur le Mallet-Isaac et je ne savais donc rien du dernier des Hohenzollern. Aucun des noms que monsieur Poirier me jeta comme autant de bouées de sauvetage - Hohenlohe, Bülow, Bethmann - Hollweg - n'ayant déclenché en moi la moindre étincelle, il me fit une remarque cinglante sur mon manque de travail, et le masque encore plus sévère que d'habitude, me renvoya à ma place.
Je crois bien qu'il avait voulu me signifier par là qu'il n'était que le professeur d'histoire et rien d'autre."

dimanche 4 décembre 2016

Bibliomanie

Carl Spitzweg,1850.

Le site Atlas Obscura revient sur une maladie mentale liée à la possession compulsive de livres. C'est à lire ici, en anglais. Le site mentionne aussi un ouvrage du XIXe siècle consacré à cette maladie :


Cela me donne envie de me le procurer !

jeudi 25 août 2016

Une librairie flottante


Lors d'une escale aux Seychelles, en novembre 2015


Le Logos-Hope est un ancien ferry construit en 1973, acheté et rénové par GBA Ships grâce à des dons en 2004 puis mis en circulation dès février 2009, qui a été transformé en librairie flottante humanitaire.
GBA Ships est une organisation internationale chrétienne à but non lucratif basée en Allemagne qui propose à son bord plus de 5000 livres dans des domaines variés. Les livres se vendent par unité : 100 unité valant 1 200  francs CFA (environ 2 euros). Un livre peut coûter 1000 unités.
A bord, 400 volontaires de 60 nationalités différentes discutent avec les visiteurs. L’argent récolté servira à des œuvres caritatives.
Le Logos - Hope mouille actuellement au Cameroun.

Michel Butor (1926 - 2016)

L'écrivain Michel Butor est mort ce 24 août. Il vivait retiré en Haute-Savoie dans un grand chalet envahi par les livres. Je me permet de rependre deux textes écrits à son propos dans lesquels deux lectrices expliquent pourquoi elles aiment les écrits de Michel Butor.

Michel Butor est mort hier, et c'est un auteur que j'aime. Le Monde écrit à son sujet : "Mais, à vrai dire, tout pouvait susciter chez lui un engouement : un herbier, un musée, un atelier, un album de photographies, une ruine, des collages, une œuvre artisanale, un calendrier, une architecture. Tout ranimait le goût de la langue et une sorte de devoir de description inépuisable. Il jouait sur les mots avec gaieté, avec sensualité, mais sans superficialité ; les mots et les langues étrangères ; ce n’était pas plus un poète de l’épanchement lyrique qu’un poète formaliste."
Voilà exactement ce qui me plaît dans ses écrits : cet "engouement" pour la vie, sous de multiples formes. Le mois dernier, Michel Butor a dit, dans une interview : "une des façons les plus importantes d’agir sur la réalité, c’est de passer par le langage". Je trouve cette phrase très forte, car elle est simple et profonde à la fois.
Et comme il était curieux de tout, Michel Butor a aussi écrit sur les mathématiques :

 LA QUADRATURE DU CERCLE A PARME 
 ou le sfumato des mathématiques

 Le grec qui s’interrogeait à l’ombre des colonnes 
de quelque temple dédié aux déesses de la mesure 
au bord de la mer transparente sur la distance 
entre deux retours de la même irrégularité 
scandant la trace d’une roue de char sur le sable
 par rapport à l’un de ses rayons.

A dû d’abord croire que ses difficultés
venaient de ce que la plage n’était pas assez lisse
et la roue pas assez bien faite mais
lorsqu’après avoir multiplié les précautions
pour approcher de plus en plus d’une plage
céleste et d’une roue divine

Il s’est aperçu qu’en prenant
des unités aussi petites que possible
il restait toujours une différence
une blessure par laquelle s’écoulaient
indéfiniment des chiffres aussi nombreux
que les grains de sable de la mer

Il a dû se dire que c’était encore une manifestation
de la malice des puissances voulant empêcher
les mortels de gravir jamais leur Olympe
et demeurer seuls dans leur jour en nous laissant
dans notre nuit et qu’il n’y avait qu’à se résigner
devant l’arbitraire de ces vieux dieux

Mais lorsqu’il a décidé de nommer ce nombre élusif
s’il a choisi la première lettre du mot périphérie
n’était-ce pas aussi parce que dans son écriture
elle évoquait immanquablement une porte
avec son linteau et ses deux appuis
qui peut et doit ouvrir dans le mur du destin

Sur les chemins de la nuit et du jour
mariant le clair et l’obscur sur l’évangile
d’un monde inépuisablement plus vaste
que celui des anciens les horizons s’élargissant
en spirale dans la lecture traduction
des ermites futurs dialoguant avec les fauves

A la lumière des nouveau-nés la Terre carrée
s’égalant au Ciel circulaire devenant
un cercle elle-même osant être sphère
les bergers se réfléchissant
dans les anges tourbillonnaires
de ses coupoles prophétiques

Ce premier article vient d'ici.

"Vous avez mis le pied gauche sur la rainure de cuivre, et de votre épaule droite vous essayez en vain de pousser un peu plus le panneau coulissant. Vous vous introduisez par l'étroite ouverture en vous frottant contre ses bords, puis, votre valise couverte de granuleux cuir sombre couleur d'épaisse bouteille, votre valise assez petite d'homme habitué aux longs voyages, vous l'arrachez par sa poignée collante, avec vos doigts qui se sont échauffés, si peu lourde qu'elle soit, de l'avoir portée jusqu'ici, vous la soulevez et vous sentez vos muscles et vos tendons se dessiner non seulement dans vos phalanges, dans votre paume, votre poignet et votre bras, mais dans votre épaule aussi, dans toute la moitié du dos et dans vos vertèbres depuis votre cou jusqu'aux reins. Non, ce n'est pas seulement l'heure, à peine matinale, qui est responsable de cette faiblesse inhabituelle, c'est déjà l'âge qui cherche à vous convaincre de sa domination sur votre corps, et pourtant, vous venez seulement d'atteindre les quarante-cinq ans. Vos yeux sont mal ouverts, comme voilés de fumée légère, vos paupières sensibles et mal lubrifiées, vos tempes crispées, à la peau tendue et comme raidie en plis minces, vos cheveux qui se clairsèment et grisonnent, insensiblement pour autrui mais non pour vous, pour Henriette et pour Cécile, ni même pour les enfants désormais, sont un peu hérissés et tout votre corps à l'intérieur de vos habits qui le gênent, le serrent et lui pèsent, est comme baigné, dans son réveil imparfait, d'une eau agitée et gazeuse pleine d'animalcules en suspension. Si vous êtes entré dans ce compartiment, c'est que le coin couloir face à la marche à votre gauche est libre, cette place même que vous auriez fait demandé par Marnal comme à l'habitude s'il avait été encore temps de retenir, mais non que vous auriez demandé vous-même par téléphone, car il ne fallait pas que quelqu'un sût chez Scabelli que c'était vers Rome que vous vous échappiez pour ces quelques jours. Un homme à votre droite, son visage à la hauteur de votre coude, assis en face de cette place où vous allez vous installer pour ce voyage, un peu plus jeune que vous, quarante ans tout au plus, plus grand que vous, pâle, aux cheveux plus gris que les vôtres, aux yeux clignotants derrière des verres très grossissants, aux mains longues et agitées, aux ongles rongés et brunis de tabac, aux doigts qui se croisent et se décroisent nerveusement dans l'impatience du départ, selon toute vraisemblance le possesseur de cette serviette noire bourrée de dossiers dont vous apercevez quelques coins colorés qui s'insinuent par une couture défaite, et de livres sans doute ennuyeux, reliés, au-dessus de lui comme un emblème, comme une légende qui n'en est pas moins explicative, ou énigmatique, pour être une chose, une possession et non un mot, posée sur le filet de métal aux trous carrés, et appuyée sur la paroi du corridor, cet homme vous dévisage, agacé par votre immobilité, debout, ses pieds gênés par vos pieds."    

C'est l'incipit de La Modification de Michel Butor sur lequel j'ai beaucoup travaillé et qui est fréquemment utilisé lors d'ateliers d'écriture pour la minutie descriptive au scalpel et l'implication du lecteur dans le processus d'écriture.... Michel Butor est décédé hier, à l'âge de 89 ans.

L'article ci-dessus a été publié sur Google en privé mais son auteur m'a autorisé à le reproduire ici.


samedi 20 août 2016

Lectures présidentielles d'été




Comme l'an dernier, le président américain Obama a dévoilé le titre de ses lectures de vacances. Au menu, thriller, autobiographie sportive, récit animalier, histoire et science-fiction : 
- La Fille du train de Paula Hawkins, thriller à succès 
- Barbarian days : a surfing life de William Finnegan, autobiographie d'un journaliste et surfer. 
 - H is for Hawk d'Helen Macdonald, récit biographique dans lequel la narratrice, en deuil de son père, adopte un autour dont le dressage s'avère bien difficile. 
- The Underground railroad de Colson Whitehead, roman historique retraçant les péripéties d'une jeune esclave noire, Cora, dans une plantation de coton en Géorgie et qui va tenter de s'échapper. 
 - Seveneves de Neal Stephenson, un roman de science - fiction. La fin du monde est proche. La lune explose et un groupe de 200 humains est envoyée dans la Station spatiale internationale, malgré la pluie de météorites suivant l'explosion. Alors que la Terre est en feu, tout l'espoir réside dans l'arche et ses 200 humains, dont la mission sera de repeupler l'humanité détruite.

Cette idée est-elle une tentative de réaction suite à la publication d'une étude du Pew Research Center, effec­tuée en 2014, qui dévoile que 23% de la popu­la­tion améri­caine avoue ne pas avoir lu le moindre livre depuis un an ? Une seconde étude, de l'U.S. Bureau of Labor Statis­tics, estime quant à elle à huit minutes la durée moyenne de lecture quoti­dienne d'un Améri­cain âgé entre 25 et 34 ans.

La photo illustrant l'article montre le couple Obama faisant  une lecture animée du livre Max et les Maximonstres à des enfants lors des fêtes de Pâques à la Maison Blanche, le 28 mars dernier.

mercredi 17 août 2016

Avancée du jardin statuaire



Il avance peu à peu, grâce au travail de mon fils.




jeudi 4 août 2016

Les écrivains les plus riches

Un classement, réalisé par le magazine Forbes, compile des chiffres officiels et des analyses d’experts du secteur afin d’estimer les revenus des auteurs sur leurs ventes mais aussi les droits qu’ils perçoivent des adaptations audiovisuelles de leurs œuvres. 
 En premier, on trouve l’auteur américain de thrillers James Patterson, l’auteur de plusieurs séries à succès dont celle de l’inspecteur Alex Cross. Le second est Jeff Kinney, auteur de la série pour la jeunesse du Journal d’un dégonflé. La troisième place est occupée par J.K. Rowling, auteur de la saga Harry Potter. Le quatrième est l’auteur de polars judiciaires John Grisham et le cinquième, Stephen King.
A noter qu'il n'y a aucun Français dans les dix premiers de la liste.

"Lorsque des intellectuels interviennent pour parasiter leurs messages, démystifier leurs mensonges, les dictateurs paniquent. "

Vous trouverez ici un entretien croisé avec les écrivains Alain Mabanckou et Abdourahman Waberi, deux écrivains africains qui expliquent leur vision de l’intellectuel engagé dans des régimes de dictature.

samedi 30 juillet 2016

Un autographe de Gracq



Voici un autographe de Julien Gracq, illustré d'une photo du bord de Loire, près du Grenier à sel. C'est d'ailleurs autant pour l'écriture que pour la photo que j'en ai fait l'acquisition.

mardi 26 juillet 2016

Déception


J'ai éprouvé finalement une petite déception à la lecture de L'amour conjugal de Moravia. Je n'ai pas ressenti le choc de la lecture du court passage que j'évoquais précédemment. Il y a tout de même de belles pages, comme cette description de la femme aimée, en ouverture du roman.
« Aimer, cela veut dire, entre bien d’autres choses, trouver du charme à regarder et à considérer la personne aimée. Et trouver du charme non seulement à la contemplation de sa beauté mais encore de ses défauts, qu’ils soient rares ou non. Dès les premiers jours de mon mariage, j’éprouvai un inexprimable plaisir à regarder Léda ( c’est ainsi qu’elle se nomme ), à épier son visage et toute sa personne dans ses moindres mouvements et ses plus fugitives expressions. 
Ma femme, quand je l’épousai, avait à peine plus de trente ans. ( Depuis et après avoir mis au monde trois enfants, quelques-uns de ses traits ont, je ne dirai pas changé, mais se sont en partie modifiés. ) D’assez haute stature quoique vraiment pas très grande, elle était belle, avec un corps et un visage assez loin de la perfection. Sa figure longue et mince avait cet air fuyant, égaré, presque impénétrable qu’ont parfois les déesses classiques dans quelques médiocres tableaux anciens dont la peinture incertaine est rendue plus hésitante encore par la patine du temps. Cet air singulier, cette beauté insaisissable qui, tel un reflet de soleil sur un mur, ou l’ombre d’un nuage au-dessus de la mer, pouvait à chaque instant s’effacer, lui venait sans doute de ses cheveux d’un blond métallique, toujours un peu défaits, dont les longues mèches évoquaient l’envol de la peur, la fuite, envol aussi de ses yeux bleus, immenses, légèrement obliques, avec leur pupille dilatée dont le regard humble et flottant suggérait, comme la chevelure, un état d’âme craintif et fuyant. 
Elle avait le nez long, droit et noble et une grande bouche rouge dont la lèvre inférieure ourlait largement un menton trop petit et dont la ligne extrêmement sinueuse évoquait une sensualité lourde et sombre. C’était un visage irrégulier et cependant très beau, d’une beauté comme je l’ai dit, insaisissable qui, dans certains moments et certaines circonstances – on le verra plus loin – devenait évanescent. 
Il en était de même de son corps. Elle avait le buste maigre et délicat d’une jeune fille au contraire, la solidité, la force, l’épanouissement des hanches, du ventre et des jambes dénotaient une vigueur musclée et provocante. Mais cette disproportion, comme celle du visage, disparaissait sous la grâce d’une beauté qui, comme un air familier et impalpable ou une lumière mystérieusement transfigurante, l’environnait de la tête aux pieds d’un halo de perfection. C’est étrange à dire, mais parfois, en la regardant, il m’arrivait de penser à elle comme à une personne de traits et de formes classiques, sans défauts, toute harmonie, sérénité, symétrie. Au point que cette beauté, disons spirituelle, faute d’une autre appellation, m’exaltait et m’enchantait.»

lundi 25 juillet 2016

Un choc littéraire... A confirmer.

"Je pouvais maintenant la voir grimper la pente du coteau, vers l'aire sur laquelle surgissait la masse arrondie des meules. Elle s'agrippait aux buissons, penchée en avant, glissant et trébuchant, et dans son visage tendu et avide, aux yeux dilatés, dans les gestes de son corps, je reconnus de nouveau sa ressemblance avec une chèvre qui grimpe pour brouter. Et puis, comme elle arrivait en haut de la montée, une silhouette d'homme sortit de l'ombre, se pencha, la prit par le bras et la tira presque de tout son poids. En voulant lui rendre l’équilibre, l’homme virevolta et je reconnus Antonio. Cette fois, je compris tout et je fus saisi en même temps d’un grand froid et d’une grande stupeur de n’avoir pas compris plus tôt. » 
Cette citation est extraite d'un court roman d'Alberto Moravia, L'amour conjugal. Je n'ai pas encore lu ce livre, mais ce passage découvert au hasard d'Internet m'a parlé tout de suite. Je veux voir si le texte entier me fait la même forte impression

samedi 23 juillet 2016

Un bel objet



Voici un écritoire trouvé en foire - à - tout aujourd'hui. Posés dessus, des cours d'histoire médiévale d'université datant du XIXe siècle et un porte - plume ancien en ivoire de Dieppe.

Fulgurances de Julien Gracq

C'est exactement pour cela que j'aime autant cet auteur. Il dit précisément ce qu'il faut, comme en témoigne ces extraits d'un entretien donné à Jean Carrière vers 1986.

"Je ne crois pas aux arrières - monde poétiques, je ne crois pas au "fuir là-bas, fuir !..." de Mallarmé, ni à cette idée de l'évasion par l'art qui sous-temps tout le romantisme français. Et qui s'exprime encore ouvertement à travers Baudelaire. Je me sens beaucoup plus d'accord avec la conception unitive qui me semble être celle de Novalis : le monde est un, tout est en lui ; de la vie banale aux sommets de l'art, il n'y a pas de rupture, mais épanouissement  magique, qui tient à une inversion intime de l'attention, à une manière tout autre, tout autrement orientée, infiniment plus riche en harmoniques, d'écouter et de regarder. Ce qui fait que la littérature (j'ai envie de dire plutôt : la poésie) est à prendre en effet extrêmement au sérieux, et à prendre au sérieux sans tristesse aucune, à cause de son immense, et quotidienne, capacité de métamorphose et d'enrichissement. Mais à une condition : ne pas confondre, si souhaitable que cela puisse paraître, les deux manière de regarder; savoir que l'expérience poétique, qui est une expérience vraie, et complète, n'est pas utilisable, n'est pas transposable directement dans l'univers pratique."
(...)
"Il y a dans l'enseignement secondaire français une discipline traditionnellement bifide qu'on a souvent moquée, comme une sorte de fourre-tout mal constitué, et qui s'appelle Histoire -et- Géographie (avec des tirets). J'ai assisté en son temps aux efforts, finalement victorieux, que déployait Emmanuel de Martonne pour les disjoindre, et pour faire créer une agrégation spécifique de géographie. Elle a été créé, mais elle n'a rien changé ; les mêmes maîtres, dont j'ai été, continuent à enseigner - toujours avec des tirets - l'histoire-et-géographie.
C'est qu'il y a là en réalité une jointure solide, un continuum de nature en grande partie imaginative (même si l'une est susceptible de vérifications successives, histoire et géographie, à chaque moment, n'ont d'existence l'une et l'autre que dans l'imagination).Capable de résister à la dissection. Avant, bien longtemps avant de l'enseigner, dès mes années de lycée, le continuum Histoire-et-Géographie a été pour moi une réalité familière, une référence spontanée : c'est la forme concrète que revêtent pour moi spontanément l'espace et le temps, c'est le canevas unifié continu sur lequel se projettent pour moi d'eux-mêmes aussi bien les évènements que mentionnent le journal que les fictions que j'imagine."

vendredi 22 juillet 2016

Mon jardin statuaire






Quelle surprise ! Voici que j'ai découvert un jardin statuaire chez moi, comme dans le roman de Jacques Abeille. Ce sont déjà  deux sculptures qui sont apparues en l'espace de quelques jours. J'espère qu'il va grandir rapidement...

dimanche 21 février 2016

Les bibliothèques d'Umberto Eco



Umberto Eco avait réuni près de 35 000 livres dans son appartement de Milan, mais en possédait 50 000 au total, éparpillés à la campagne, à Bologne et à Paris, avait-il confié au Figaro Magazine en 2011. 
Il vivait donc entouré d'ouvrages, dans lesquels il puisait sa culture et ses sujets de prédilection pour ses romans. Il savait exactement où se trouvaient tous les livres dans sa bibliothèque et il avait sélectionné quelques-uns des plus beaux manuscrits en sa possession pour donner une allure encore plus littéraire à son salon, en les protégeant sous des vitrines de verre. 
Il tenait son goût pour les livres de sa grand-mère maternelle. C'était une lectrice furieuse selon lui. Elle allait très souvent emprunter des livres à la bibliothèque, sans préférence. Grâce à elle, Umberto Eco a lu Le Père Goriot à douze ans, par exemple. Son grand-père paternel, qui est mort quand il avait six ans, était typographe. Lors de sa retraite, il s'était mis à relier les livres que les gens lui confiaient. À sa mort, personne n'avait réclamé les livres sur lesquels il travaillait parce qu'ils n'avaient pas grande valeur. Ils ont fini dans une caisse chez les parents du jeune Umberto qui a passé des années à détruire ce trésor à force de lire et relire Les Trois Mousquetaires, des romans pour demoiselles et beaucoup d'autres. 
Umberto Eco allait chaque mois à la grande foire de vieux livres de Milan et rachetait les lectures de son passé. Il se disait proustien, trouvant le sens de la vie dans les souvenirs de l'enfance, essentiellement les livres.

samedi 20 février 2016

Deux "nouveaux" poèmes de Tolkien



Deux poèmes écrits par Tolkien en 1936, ignorés pendant 80 ans, viennent d'être exuhmés. Ils datent de l’époque où Tolkien était enseignant à la Our Lady’s School de Oxfordshire. C’est un chercheur qui a redécouvert ces deux poèmes, via une note écrite par Tolkien lui même et dans laquelle il affirmait avoir fait paraître deux poèmes dans un magazine : le Abingdon Chronicle. Grâce à d’anciens élèves de l’école, il est arrivé à retrouver les magazines et les intrigants poèmes. Le premier, The Shadow Man, est une première version d’un texte publié en 1962 dans le livre Les Aventures de Tom Bombadil. Le deuxième, vraisemblablement inédit, est un chant de Noël à l’atmosphère très sombre.

vendredi 12 février 2016

Un carnet de Marcel Proust à lire en ligne



La BnF a mis en ligne l’« Agenda 1906 » de Marcel Proust, acquis en 2013. Ce mystérieux carnet qui n’était mentionné ni dans sa correspondance ni dans ses cahiers, contient des notes de travail qui esquissent une fin différente pour la Recherche et donnent une autre version du célèbre épisode de la madeleine, qui évoquait alors l’odeur et non le goût du thé. 
Ces notes révèlent également certains aspects de la vie privée de l’auteur.
L'agenda a fait l'objet d'une étude détaillée livrée ici : transcription du texte, ajout de référence biographique des personnes mentionnées, de photographies des lieux, etc..
Alors que je me pose la question de la lecture de l'oeuvre de Proust, que j'ai sans cesse reporté, ce carnet donne une vision intéressante du processus d'écriture.

Humour de libraires





L'équipe de campagne de Nicolas Sarkozy avait incité les sympathisants à précommander le livre sur les sites de ventes en ligne. Le geste n'avait pas plu aux libraires indépendants, qui avaient tout simplement été oubliés du communiqué. Alors, quand ils se sont retrouvés avec des cartons et des cartons de La France pour la vie envoyés de force par l'éditeur Plon, certains libraires ont répondu à ce manque de savoir - vivre en trouvant au livre une place intéressante sur leurs linéaires !

Tu m'as mis au péril de la mer



J'ai (enfin) lu Prose pour l'étrangère de Julien Gracq, une amie ayant résolu mon dilemme et offert le premier tome des oeuvres complètes en Pléiade.
Il s'agit d'un texte très court, dans le ton du recueil Liberté Grande. C'est dans sa poésie que Julien Gracq m'apparaît comme surréaliste, et ce n'est pas ce que je préfère chez lui.
J'en retiens toutefois ce beau passage que je dédicace à ma femme :
"A chaque heure, à chaque minute, ta vie alerte ma vie comme une cloche fondue dans le matin qui fait bondir le jour plus clair et traverse le coeur du pressentiment d'une grande fête."


Notes de lecture

Je m'interroge sur ma façon de lire. Après plusieurs semaines passées sans ouvrir un seul livre, mais les laissant s'amonceler au pied du lit, je viens d'en dévorer trois.
J'étais autrefois un lecteur régulier, enchaînant les livres mais l'irruption d'Internet dans mon espace culturel a fragmenté ma lecture.
Toujours est-il que je viens de terminer Littérature vagabonde de Jérôme Garcin, Relire, enquête sur une passion littéraire de Laure Murat et Le déjeuner des bords de Loire de Philippe Le Guillou.
Du premier, j'ai attrapé une liste de livres ou d'auteurs à lire : Georges Perros, Jean - Louis Bory, Jacques Chessex, François - Régis Bastide et Pierre Béarn.
Le second m'a fait réfléchir sur mes relectures bien - sûr, mais aussi mes lectures : je lis peu d'auteurs femmes, mais je ne semble pas être très original en cela selon l'enquête de Laure Murat. Ma lecture semble plutôt être  celle des gens du Moyen - Age si j'en crois Barthes, que je n'apprécie pas à cause de son jargon inutile selon moi (ressemblant en cela à Julien Gracq d'après Phillipe Le Guillou) :
"Ce que Barthes appelle la "lecture éphémère" ou la "lecture sans retour", désignant ces livres qu'on ne lit qu'une fois, qu'on traverse comme le train un paysage où l'on ne reviendra plus, serait lié à la naissance du capitalisme. Elle relèverait d'une "idéologie de la consommation", d'une "phénoménologie de la dévoration", qui aurait été impensable sous l'Antiquité ou au Moyen - Age, époques de l'éternel retour au texte et à la glose".
De l'enquête de Laure Murat, je garde aussi l'envie de relire une nouvelle fois Bouvard et Pécuchet !
Enfin, le petit livre de Philippe Le Guillou m'emplit de nostalgie. Celle d'abord d'avoir (re)découvert Julien Gracq trop tard pour oser lui dire mon émotion et mon respect face à son oeuvre. L'autre ensuite pour ce sentiment d'une époque disparue qui me fait parfois ne pas me sentir à ma place dans l'époque où nous sommes. Le déjeuner des bords de Loire me donne enfin de nouveau l'envie de m'arrêter à Saint Florent - le - Vieil bientôt, pour hanter les pas de Julien Gracq.

mardi 9 février 2016

Des histoires qui s'achèvent




Juliette Benzoni, auteur de romans historiques, est morte ce week-end. Née en 1920, elle commença dans l'écriture comme journaliste (notamment pour la revue Historia) avant de se lancer dans le roman historique au début des années 1960 avec la série des Catherine, une saga composée de six romans se déroulant durant la Guerre de Cent ans.
Elle poursuivra dans cette veine avec plus de 80 romans se déroulant principalement au temps de la Renaissance italienne, des croisades, ou de la guerre de Cent Ans. Si ses romans mêlaient les histoires d’amour à la grande histoire, très rigoureuse, la romancière s’appuyait sur des recherches historiques poussées pour écrire ses intrigues.
Traduite dans une vingtaine de langues, Juliette Benzoni a vendu plus de 300 millions de livres. Plusieurs de ces romans ont été adaptés pour la télé ou le cinéma.
J'ai découvert cet auteur par ma grand-mère et madame Benzoni a su plusieurs fois me transporter par ses livres dans ces époques que j'ai étudiées par la suite.