mercredi 21 janvier 2009

Gracq, érotique ?

Je n’imaginais pas Gracq en auteur « érotique ». Et pourtant, la lecture de « La forme d’une ville » se révèle plutôt sensuelle.

La relation qu’entretient Julien Gracq avec ses villes (Caen, Quimper, Avranches, Paris et bien sûr Nantes) est charnelle, en témoignent ces quelques passages.

« Pour s’être prêtée sans commodité, pour ne s’être jamais tout à fait donnée, peut-être a-t-elle enroulé plus serré autour d’elle, comme une femme, le fil de notre rêverie, mieux jalonné à ses couleurs les cheminements du désir » (page 2)
« Certains soirs du début de l’été, où les odeurs végétales, lourdes et sucrées, du Jardin des Plantes voyageaient jusqu’à nous à travers la rue, la proximité de ce nœud de vie si serré, et pourtant inaccessible, nous montait à la tête (…) » (page 6)
« Mais le sentiment persiste, plus fort que tout, que je n’ai rien à attendre d’elle (la ville d’Angers) : aussi coupant, aussi injuste que l’indifférence à une femme dont on s’assure, en une seconde, que rien d’elle jamais ne s’animera pour vous sous le regard. » (page 17)
« (…)le simple sentiment de la soudaine mollesse de l’air le réalise : la chaleur sensuelle d’un lit défait se répand et coule pour moi à travers les rues. » (page 27)
« (…) une dérive engourdie, frileuse, le long d’un vaste corps vivant dont on perçoit la respiration toute proche, mais qu’un sort malin empêche de rejoindre. » (page 43)

Gracq n’est pas Conche, c’est évident. Si le philosophe parle magnifiquement de l’amour, il rejette le désir. Cela n’est pas le cas de Julien Gracq, lisiblement.

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