mardi 12 juin 2007

Pourquoi lire Borges ?

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Taxés d'érudits et de complexes, les livres de Borges défient le lecteur, qui tourne souvent autour sans oser s'y plonger. On l'a jugé pédant, fermé sur lui-même, on l'a traité de rat de bibliothèque (ce dont il était plutôt fier !) étalant fièrement son érudition dans des nouvelles qui semblent de mini encyclopédies. On a tort !

S’il y a quelque chose de vrai là-dedans, c’est que Borges ne consultait pas les encyclopédies, il les lisait. L’écriture de Borges était tout entière encyclopédique : recouper, copier-coller des histoires et des faits qui jamais n'auraient dû se croiser, comme deux entrées placées côte à côte dans un dictionnaire par le seul miracle de l'ordre alphabétique, et dont le rapprochement constitue l'ouverture secrète sur un monde parallèle. Explorer en fait.

Ce que Borges aurait emporté sur une île déserte ? Une encyclopédie, bien sûr, car ce faisant il aurait emporté avec lui le reste du monde. Ce que produit Borges en utilisant tout ce qu'il absorbe de ses lectures, c'est une " prodigieuse illusion de savoir " ; ce qui l'anime, une curiosité jamais rassasiée, la volonté d'embrasser l'intégralité du monde en un seul regard.

Lire Borges c'est comme retrouver un ami fort sage et malicieux qui adore vous raconter des histoires qui vous donnent envie de vous cultiver, de découvrir les livres dont il parle avec passion et intelligence. C'est pour moi le monument littéraire le plus facile d'accès, doté d’une écriture simple et directe, sans fioriture. Borges a la faculté de tailler dans le récit pour n'en laisser que l’essentiel, la structure.

Selon Alan Pauls, auteur d’un essai sur Borges (le Facteur Borges) il faut oser lire le maître comme il doit être lu, en replaçant le rire au coeur de l'écriture, " un rire qui nous enlève et nous transporte en un lieu hors de la pensée ". On raconte qu'avec son complice Bioy Casares, Borges s'enfermait des journées entières pour écrire, et qu'on entendait fuser les fous rires au travers de la porte...

De Borges, on peut lire :

- Fictions, un recueil contenant 16 nouvelles ou contes relevant du fantastique. Je recommande particulièrement « Tlön, Uqbar, Orbis Tertius » qui raconte une conspiration d'intellectuels pour créer un monde imaginaire. Il y a aussi « La bibliothèque de Babel » / imaginez que l'univers soit une immense bibliothèque sur les étagères de laquelle repose un nombre infini de livres.

- L’Aleph, un recueil de dix-sept nouvelles où l’on retrouve les thèmes de prédilection de Borges : les nombreuses références littéraires (parfois volontairement fantaisistes), la métaphysique, les labyrinthes, l'infini, la mort et l’immortalité. Je recommande justement la lecture de « L’Immortel » qui relate l’histoire d’un soldat romain qui se met en quête de découvrir le fleuve d’immortalité qui coule au bord du monde.

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