lundi 27 août 2007

Pas d'accord !

Une fois n’est pas coutume… Je ne suis pas d’accord avec la critique du livre d’Alberto Manguel, La bibliothèque, la nuit, faite par Pierre Assouline.

« On en ressort pourtant avec l’étrange impression que c’est trop ; non qu’il en fasse trop mais chez lui, tout acte semble précédé de la lecture idoine; rien ne paraît se faire, y compris dans les ressorts les plus anodins de la vie quotidienne, sans référence à un livre. C’est oppressant, asphyxiant même pour le lecteur le plus avide de nouvelles pistes. On a envie de lui crier “Alberto, pose ton livre, ouvre les fenêtres et va prendre l’air, le monde t’attend !”. Un rat de bibliothèque sort plus souvent que lui. »

Je n’ai vraiment pas eu cette impression. Au contraire, Alberto Manguel est un lecteur qui bouge, voyage, rencontre, comme en témoigne son autre livre Journal d’un lecteur.

La bibliothèque, la nuit est une réflexion sur l’agencement des bibliothèques, le classement à opérer. En ce sens, il recense les bibliothèques qu’il a connues ou visitées. Mais ce n’est jamais étouffant. Bien au contraire, ce voyage m’a paru comme autant de fenêtres ouvertes vers d’autres mondes… intérieurs il est vrai !

jeudi 23 août 2007

Deux BD à lire ensemble !

Le recueil. "Elles" rassemble neuf nouvelles érotiques publiées au Japon par un dessinateur français.

Au fil des pages, Frédéric Boilet se met en scène et s’amuse en usant d'un graphisme sensuel s’inspirant souvent de la photo et de la vidéo.

Libertine mais cultivée, la BD multiplie les clins d’œil au cinéma français, comme "L’Homme qui aimait les femmes" de François Truffaut ou "La Discrète".

Frédéric Boilet est le seul Français pouvant prétendre au titre de mangaka. En effet, lauréat en 1993 d’une bourse de l’éditeur japonais Kôdansha, il séjourne une année à Tokyo, avant de s’y installer quatre ans plus tard.

Il est devenu un véritable passeur entre son pays d’origine et celui d’adoption. Il a effectué notamment plusieurs traductions et adaptations graphiques dont "Quartier lointain" et "L’Orme du Caucase" de Jirô Taniguchi.

En 2001, il organisa à Tokyo l’événement Nouvelle manga (auquel participa Aurélia Aurita), et lança un mouvement qui tente de créer des ponts entre créateurs de mangas, de BD et de comics.

Frédéric Boilet aligne les albums à succès comme "Tokyo est mon jardin" (avec Benoît Peeters) ou "L’Epinard de Yukiko".


Récit hautement érotique, "Fraise et Chocolat" retrace les premières semaines d'une passion amoureuse à travers le regard d'une jeune dessinatrice de 25 ans. À son tour, Aurélia Aurita raconte sa passion avec Frédéric Boilet.

Ici, le sexe et l'amour sont indissociables et Aurélia ne s’en cache pas. Dans cette BD, la plume est à la fois crue dans la phrase et douce dans le dessin. Une jeune femme y raconte sa sexualité. Lectrice d'Anaïs Nin, l’auteur dévoile sans pudeur le spectacle de ses expériences intimes, mais fait aussi la preuve que le sexe peut être graphique sans être pornographique.

jeudi 9 août 2007

Une maison d'écrivain


Le dernier livre de Jean-Paul Kauffmann, La maison du retour, est paru chez Nil éditions, dans la collection “Maisons”. Le propos de cette collection est que l’écrivain invité évoque sa maison de famille, de vacances ou bien d’enfance. Pour lui, c’est un airial, où il a trouvé refuge.

Ce livre est aussi pour l’écrivain – journaliste l’occasion d’évoquer sa relation avec les arbres qui semble avoir remplacé celle qu’il entretenait avec les livres. Jean-Paul Kauffmann a aimé les livres et la littérature. Certains d’entre eux lui ont même sauvé la vie en captivité, lorsqu’il fut retenu en otage durant trois ans au Liban.

D’ailleurs, une fois libre, il n’a eu de cesse de reconstituer cette bibliothèque salvatrice chez lui. Depuis son retour, Jean-Paul Kauffmann a publié de beaux livres comme La chambre noire de Longwood ou La lutte avec l’ange.


Mais aujourd’hui les livres semblent avoir reculé devant les arbres et le vin dont il évoque l’odeur (désolé, c’est un non buveur qui écrit cela) à de nombreuses reprises.

(Note : un airial désigne une maison traditionnelle des Landes ainsi que la clairière plantées de chênes ou châtaigniers qui l’abrite souvent)

vendredi 3 août 2007

La Très Grande Bibliothèque

Je profite d’un article du site du Monde.fr pour retracer ici l’historique de la Très Grande Bibliothèque voulue par François Mitterrand.

Le 14 juillet 1988, au détour du traditionnel entretien qu'il donne le jour de la Fête nationale, François Mitterrand, qui vient d'être réélu, annonce la création d'une "bibliothèque d'un genre entièrement nouveau". C'est Jacques Attali, son conseiller, qui lui a soufflé l'idée. Pour ce dernier le futur établissement devait cependant être une tête de réseau informatisé. Le projet n'impliquait pas forcément la construction d'un grand bâtiment.

En 1988, il existe en effet une urgence à résoudre. La vénérable Bibliothèque nationale de la rue de Richelieu est au bord de l'asphyxie. Son administrateur général, André Miquel, a jeté l'éponge en octobre 1987. Il a été remplacé par l'historien Emmanuel Le Roy Ladurie, qui propose deux solutions pour désengorger son établissement : création d'une annexe ou déménagement total.

Au cours de l'été 1988, Patrice Cahart, président du conseil d'administration de la BN, et Michel Melot, directeur de la Bibliothèque publique d'information du Centre Pompidou, planchent sur la définition de la nouvelle bibliothèque. Réalisme ou myopie, l'idée du réseau s'efface peu à peu au profit du béton. Car une bibliothèque virtuelle, avec des collections entièrement numérisées consultables sur écran, semble une utopie lointaine et coûteuse.

Un concours d'architecture est lancé en avril 1989. En août, le choix du jury - Emmanuel Le Roy Ladurie en est écarté - se porte sur un jeune architecte, Dominique Perrault. Il propose quatre grandes tours de verre, conçues pour recevoir 4 millions de volumes, en forme de "livres ouverts" autour d'un vaste jardin, en contrebas.

Comme on imagine mal le président de la République inaugurer des rayonnages vides, on décide de faire venir de la rue de Richelieu une partie des stocks. A partir de quelle date va-t-on expédier les livres à Tolbiac : 1900, 1914, 1945, 1960, 1989 ? 1945 est retenue.

Cette décision déclenche une tempête inattendue chez les chercheurs. Ainsi l'historien et journaliste Jacques Julliard publie-t-il dans Le Nouvel Observateur, une "Lettre ouverte" à François Mitterrand pour dénoncer la "catastrophique" césure. Il sera relayé par un autre historien, Pierre Nora, dans la revue Le Débat. Le paroxysme a lieu le 11 septembre 1989, lors d'un colloque organisé dans une petite salle de l'Opéra Bastille. L'historienne Elisabeth Badinter lance une formule qui va rester dans les esprits : "Je veux tous les livres à ma place, en un temps record."

Emile Biasini trouve la solution : on déménagera l'ensemble des imprimés à Tolbiac, soit 12 millions de volumes. Et il y aura deux bibliothèques : l'une pour les chercheurs, en bas, l'autre pour le grand public, en haut. L'architecte revoit donc ses plans.

Après la querelle du contenu, celle du contenant va naître. En mai 1990, Patrice Higonnet, un universitaire américain, évoque dans le Times Litterary Supplement la menace des livres enfermés dans les tours, lentement carbonisés par la lumière trop vive du soleil. Il est relayé par Marc Fumaroli dans Le Figaro. Dominique Perrault corrige sa copie : les deux tiers des livres iront à l'ombre dans le socle du bâtiment, le reste sera abrité par des volets de bois - au détriment de la transparence de l'édifice.

En août 1991, l'Institut entre en scène. Georges Le Rieder, ancien administrateur de la BNF, appuyé par plusieurs Prix Nobel, réclame "un moratoire" pour la future bibliothèque, dont l'architecture est "inadaptée" à sa fonction comme à son environnement. Une commission est donc créée, sous la direction d'André Miquel, qui est devenu président du Conseil supérieur des bibliothèques. Ses conclusions sont remises en janvier 1992. Elles conduiront à diminuer de 7 mètres la hauteur des tours. L'architecte retourne une fois encore à sa table à dessin.

La cohabitation de mars 1993 entraîne une enquête sur le bien-fondé de la Très Grande Bibliothèque. Atteint par l'âge de la retraite, Emmanuel Le Roy Ladurie est remplacé par un autre historien, Jean Favier, venu des Archives nationales.

Ce premier patron de la Bibliothèque nationale de France accueille, le 30 mars 1995, François Mitterrand venu inaugurer un bâtiment encore vide. Peu à peu, il va se remplir. Le déménagement des imprimés de la rue de Richelieu commence en mars 1998. Le 9 octobre, les chercheurs accèdent à leur nouvelle Mecque.

Dix ans de travaux pour 8 milliards de francs (1,219 milliard d'euros) : un chantier pharaonique ou « Louis Quatorzien » probablement voulu comme tel par François Mitterrand. Mais La révolution d’Internet est intervenu depuis. Depuis décembre 2004, le moteur de recherche américain Google propose une bibliothèque universelle et gratuite en ligne. Aujourd'hui, on peut s'interroger : n’aurait-il pas mieux fallu écouter Jacques Attali et parier dès le départ sur la numérisation des collections, qui vient d'être entamée ?

mercredi 1 août 2007

Voyager avec Julien Gracq


Je signale un article très intéressant de Pierre Assouline sur deux livres de Julien Gracq, deux promenades : l’une dans Rome (Autour des sept collines) et l’autre dans Nantes (La forme d’une ville).

J’ai trouvé la photo ancienne sur le site de Yann Terrien, qui a mis en ligne des photos prises par son grand – père, Maurice Terrien, entre 1914 et 1920.